Contrat de réception-Transmission/Exécution d'ordres
Le prestataire de services d'investissement est tenu de transmettre et/ou d'exécuter les ordres de son client conformément aux instructions qui lui ont été données et qui figurent dans la convention de services.
Il n'a pas à se faire juge de l'opportunité des ordres de son client (principe de non-ingérence), dès lors qu'il a satisfait à son obligation de mise en garde. En conséquence, il ne peut refuser de transmettre ou d'exécuter un ordre (Cass. com. 14-11-2006 n° 05-12.650), si cet ordre est conforme aux termes du contrat et aux conditions du marché.
Cette obligation de respecter les termes du mandat trouve ses limites dans son devoir de vigilance, qui l'oblige à refuser d'exécuter des ordres manifestement anormaux, incohérents ou contradictoires (Cass. 1e civ. 4-5-1999 n° 97-11.703). Dans le cas contraire, il sera responsable pour avoir exécuté les ordres sans avoir interrogé son client sur ses intentions, et ce d'autant plus si le compte n'était pas suffisamment approvisionné.
Lorsque le client a conclu avec une banque une convention d'utilisation de service en ligne limitant le montant des ordres de bourse à 30 000 francs par ordre, cette dernière commet une faute si son système informatique ne permet pas la correction immédiate d'une erreur de manipulation et ne bloque pas les ordres de vente d'un montant supérieur au plafond contractuel (CA Nancy 1-10-2007 : JurisData n° 2007-352270 ; Banque et Droit 2008 n° 118 p. 25). A fortiori en va-t-il de même lorsqu'il est impossible de passer des ordres (CA Paris 23-6-2006 n° 05-1631).
En matière d'exécution d'ordres, le prestataire agit en qualité de commissionnaire (Cass. com. 13-12-2011 n° 10-10.103) et demeure tenu des actes passés proprio nomine pour le compte de son donneur d'ordres.
En cas de dépassement des ordres qui lui ont été transmis, ou en cas de transmission d'ordres de sa seule initiative en dépassement du cadre de la convention de services, il engage sa responsabilité civile contractuelle (Cass. com. 8-12-2009 n° 08-70.216 ; Cass. com. 11-3-2014 n° 13-10.508), sous réserve d'une ratification de la part du donneur d'ordres.
La ratification expresse ne soulève aucun problème particulier. En revanche, se pose la question de savoir si, en gardant le silence après réception des avis d'opéré, le client a implicitement ratifié les opérations accomplies pour son compte. Les juges considèrent que « si la réception sans protestation ni réserve des avis d'opéré et des relevés de compte fait présumer l'existence et l'exécution des opérations qu'ils indiquent, elle n'empêche pas le client, pendant le délai convenu ou, à défaut, pendant le délai de prescription, de reprocher à celui qui a effectué ces opérations de n'avoir pas agi conformément aux ordres reçus » (Cass. com. 26-3-1996 : RJDA 8-9/96 n° 1059; CA Paris 3-4-2014 : JurisData n° 2014-009227).
Contrat de mandat de gestion
En matière de mandat de gestion de portefeuille, le gestionnaire agit, selon les cas comme commissionnaire ou mandataire de son client à l'égard des tiers.
Dans ses rapports avec ses clients, en tant que mandataire, il engage sa responsabilité contractuelle en cas de dépassement du mandat de gestion. Une banque ne peut donc reprocher à un client d'avoir accepté sans réserve les relevés qu'elle lui a adressés, car « le mandat est précisément destiné à libérer le client de tous les soucis liés à la gestion de son capital, et ne l'oblige nullement à réagir aux avis qui lui sont envoyés, sauf s'il reçoit des mises en garde » (notamment CA Paris 9-5-2003 : JurisData n° 2004-220477 ; CA Paris 17-2-2006 : JurisData n° 2006-298471; CA Paris 11-5-2006 : JurisData n° 2006-310355).
a. S'il existe un mandat écrit (aujourd'hui obligatoire : voir C. mon. fin. art. L 533-14, al. 2 ; Règl. gén. AMF art. 314-58, II), l'existence du dépassement se mesure à l'aune de ses stipulations (voir par exemple pour la réalisation d'une opération risquée formellement interdite par le contrat de mandat : CA Versailles 9-4-2004 : Bull. Joly Bourse 2004 p. 453 § 87 note Bussière ; pour une gestion dynamique des fonds alors que le contrat prévoyait une gestion équilibrée : CA Paris 11-1-2002 : Bull. Joly Bourse 2002 p. 206 § 44 note Ruet, RJDA 5/02 n° 506 ; pour une gestion spéculative alors que le contrat prévoyait une gestion prudente : CA Paris 21-12-2007 : JurisData n° 2007-352866).
b. En l'absence de mandat écrit ou en l'absence de précision de l'objectif de gestion, les juges recherchent l'intention des parties quant à l'étendue du mandat, afin d'apprécier la mesure du dépassement et l'existence d'une faute (voir notamment CA Paris 26-1-2006 : Banque et droit 107/2006 p. 54 obs. de Vauplane et Daigre). A défaut d'éléments propres à établir une orientation de gestion, la gestion doit être celle d'un « bon père de famille » (CA Paris 17-2-2006 n° 02-19856 : Banque et Droit 107/2006, p. 54, obs. de Vauplane et Daigre). Pour certains magistrats cela correspond à une gestion de type « équilibrée » (même arrêt), pour d'autres à une obligation de prudence (CA Paris 11-5-2006 n° 04-23608 : RJDA 2/07 n° 164 ; Bull. Joly Bourse 2006 p. 483 § 105 note Ruet). A défaut de précision de l'objectif de gestion, une gestion dynamique sans autorisation du client appelle réparation (CA Paris 11-5-2006 n° 04-23608 : RJDA 2/07 n° 164). En l'absence d'orientation de gestion à une époque où la réglementation ne l'imposait pas, le gestionnaire ne peut, sans l'avis du client, opérer un changement d'orientation seize ans plus tard dans un sens plus dynamique que celui qui avait été jusqu'alors observé (CA Paris 25-10-2007 n° 06-1325 : RJDA 3/08, n° 285).
c. La qualité d'investisseur averti n'empêche pas le client de se prévaloir du dépassement du mandat (CA Versailles 9-4-2004 : Joly Bourse 2004 p. 453 § 87 note Bussière ; CA Paris 25-5-2007 : JurisData n° 2007-340909).
Si le client ratifie expressément ou tacitement les actes accomplis par le gestionnaire en dépassement du mandat, ce dernier n'engage pas sa responsabilité civile. Se pose la question de savoir si, en gardant le silence après réception des avis d'opéré, le client a implicitement ratifié les opérations accomplies pour son compte.
Selon la Cour de cassation « la réception sans protestation ni réserve des avis d'opéré ne fait que présumer l'existence et l'exécution des opérations qu'ils indiquent et n'empêche pas le client de reprocher à celui qui a effectué ces opérations d'avoir excédé les limites de son mandat » (notamment, Cass. com. 13-6-1995 : Bull. civ. IV n° 173 ; Cass. com. 1-2-1994 n° 353 P : RJDA 1/95 n° 33; CA Versailles 15-12-2005 : Bull. Joly 2006 p. 53 § 5 note Ruet).
a. La contestation du client peut avoir lieu pendant le délai convenu ou, à défaut, pendant le délai de prescription.
b. Il a été jugé qu'une banque manque à son obligation de faire modifier le type de mandat en cas d'impossibilité d'exercer une gestion prudente, sans que l'acceptation tacite du client pour une telle modification ne puisse être reconnue, dès lors que la répartition des actifs était une condition déterminante du mandat. Devant le refus du client de modifier l'objectif de gestion, il appartenait à la banque de dénoncer le mandat qu'elle ne pouvait plus exécuter sans faute (CA Paris 4-10-2007 : JurisData n° 2007-344162).