avocat assurance-vie
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Cabinet d'Avocat Jacques VOCHE ASSURANCE-VIE, ÉPARGNE, FINANCE
Cabinet d'Avocat Jacques VOCHEASSURANCE-VIE, ÉPARGNE, FINANCE

Assurance vie et Droit des successions


QUESTION :


1er cas

 

Mme X a trois enfants.

 

Elle souscrit un contrat d’assurance vie en désignant comme bénéficiaire un de ses fils Mme Y.

 

A son décès, les deux enfants qui n’ont pas bénéficié de l’assurance vie peuvent-ils exiger que soit remis dans la succession la somme versée à Mme Y, leur sœur, au titre de l’assurance vie dont elle est bénéficiaire et doit on tenir compte de cette somme dont elle a bénéficié pour calculer la part successorale lui revenant ?

 

2ème cas

 

Mme X a trois petits enfants.

 

Elle souscrit un contrat d’assurance vie au profit d’une de ses petites filles, Mme Y.

A son décès, les deux autres petits enfants de Mme X peuvent-ils exiger que soit remis dans la succession la somme versée à Mme Y, leur sœur, au titre de l’assurance vie dont elle est bénéficiaire et doit on tenir compte de cette somme dont elle a bénéficié pour calculer la part successorale lui revenant ?

 

3ème cas

 

Mr et Mme X sont mariés et ont trois enfants.

 

Mr X a souscrit un contrat d’assurance vue en désignant bénéficiaire son amante Mme Y.

 

Au décès de Mr X, son épouse et ses enfants peuvent-ils exiger que soit remise dans la succession la somme versée à Mme Y au titre de l’assurance vie dont elle est bénéficiaire et doit on tenir compte de cette somme dont elle a bénéficié pour calculer la part successorale lui revenant ?



REPONSE :

 

 

I- Règle de principe

 

L’article L 132-12 Code des assurance

 

NON, la somme reçue au titre de l’assurance vie par le bénéficiaire n’a pas à être prise en compte dans le calcul de la part successorale revenant aux autres héritiers non bénéficiaires du contrat d’assurance vie car aux termes de l’article L.132-12 du Code des assurances « Le capital ou la rente stipulés payables lors du décès de l'assuré à un bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers ne font pas partie de la succession de l'assuré. Le bénéficiaire, quelles que soient la forme et la date de sa désignation, est réputé y avoir eu seul droit à partir du jour du contrat, même si son acceptation est postérieure à la mort de l'assuré. »

 

Un des avantages du contrat d’assurance vie est d’échapper aux contraintes du droit des successions : les sommes transmises au décès se font hors succession et sans tenir compte de la réserve successorale prévue par les articles 912 à 917 du Code civil.

 

L’article L 132-13 Codes des assurance

 

L’assurance vie permet en outre de transmettre une partie de son patrimoine à des personnes qui ne sont pas héritiers (notamment à un « amant » aux dépens d’un époux légitime) ou d’avantager un héritier par rapport aux autres.

 

L’article L 132-13 du Code des assurances stipule en effet :

 

“ Le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant.

 

Ces règles ne s'appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés.”

 

1. Le rapport est une institution du droit successoral selon laquelle l'héritier, appelé avec d'autres héritiers à recueillir une succession, doit remettre dans la masse successorale les biens dont le défunt lui avait donné afin de calculer la part successorale revenant à chaque héritiers.

 

L'article L. 132-13 du Code des assurances dispense expressément le bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie de l'obligation au rapport à la succession du souscripteur.

 

Pour ce qui est du capital perçu par le bénéficiaire, aucun rapport n'est dû pour le capital versé.

 

Il est naturel que le capital versé échappe au rapport, car en vertu du mécanisme de la stipulation pour autrui sur lequel repose l'assurance-vie, ces sommes n'ont jamais transité par le patrimoine du défunt.

 

Elles sont au contraire servies au bénéficiaire en vertu d'un droit direct et immédiat que celui-ci tient contre l'assureur (promettant).

 

Pour ce qui est des primes, elles n’ont lieu d'être rapportées que si elles sont excessives au regard des facultés de l’assuré, au point qu’elles paraissent l’appauvrir.

 

Ce qui fait l'objet de la donation indirecte réalisée par la souscription d'un contrat d'assurance sur la vie au profit d'un bénéficiaire déterminé, ce sont les primes.

Le rapport n'est cependant dû, de ce chef, que si les primes étaient manifestement exagérées eu égard aux facultés du défunt.

 

2. La réduction des libéralités est une opération consistant à sanctionner les libéralités du défunt portant atteintes à la réserve en les réduisant à hauteur du montant de la quotité disponible ( article 920 et suivants du Code civil ).

 

La réserve héréditaire s’analyse en une fraction de la succession dont la loi garantit la transmission à certains héritiers qu’elle désigne.

 

Elle consiste ainsi essentiellement en une limite au pouvoir de disposer à titre gratuit du de cujus dont la fonction est de protéger la famille et les individus.

 

Lorsque le défunt laisse à sa survivance des héritiers réservataires, sa succession se divise ainsi en deux fractions : l'une est laissée à sa libre disposition et qualifiée pour cette raison de quotité disponible, l'autre, qui consiste dans la réserve, est dévolue impérativement par la loi aux héritiers qu'elle entend protéger dans cette mesure contre les libéralités du de cujus.

 

 La réserve héréditaire n'appartient, au sein de la parenté, qu'aux descendants ( enfants ) et, à leur défaut, au conjoint survivant.

 

En présence de descendants, la quotité disponible et le taux de la réserve héréditaire sont fonction du nombre d'enfants venant personnellement à la succession ou dont la descendance succède effectivement.

 

Concrètement, la réduction des libéralités permet à un héritier réservataire qui n’aurait pas bénéficié de la totalité de sa part de réserve en raison d’une libéralité qui aurait été consenti par le défunt à un successible, de demander à ce dernier de verser une indemnité égale à la portion excessive de la libéralité dont il a bénéficié et qui empiète en valeur sur la réserve d’un autre héritier.

 

Là encore, aux termes de l’article L 132-13 du Code des assurances le capital des assurances vies souscrit pas le défunt et perçu par un héritier ne peut faire l’objet d’une réduction.

 

Concernant les primes versées par le défunt, elles ne sont aussi susceptible de donner lieu à réduction que si elles “ manifestement exagérées eu égard à ses facultés ”.

 

II- Exceptions

 

Il existe cepandant des exceptions aux deux régles de principes expliquées ci-avant.

Ces avantages, dispense de rapport et de réduction, ne sont acquis qu’à deux conditions, le contrat d’assurance vie devant etre :

  • un véritable placement et non une donation indirecte,

  • constitué par des versements de primes dépourvus d’excès par rapport au patrimoine total du souscripteur


1er exception : donation indirecte

 

Le contrat ne peut etre qualifié d’assurance vie et donc bénéficier du dispense de rapport et de réduction s’il apparait que le but poursuivie par le souscripteur dés le début était de dépouiller irrévocablement au profit du bénéficiaire et non pas de «  placer » son argent mis dans le contrat.

 

Il s’agit alors en réalité d’une donation indirecte soumise au rapport et à réduction dans sa succession.

 

Cass. 2e civ., 23 oct. 2008, n° 07-19.950 :

 

Un contrat d'assurance-vie peut être requalifié en donation si les circonstances dans lesquelles son bénéficiaire a été désigné révèlent la volonté du souscripteur de se dépouiller de manière irrévocable. En l'espèce, un malade de 71 ans, qui laissait plusieurs enfants, avait souscrit une assurance-vie trois jours avant son décès et avait désigné bénéficiaire son ex-épouse dont il était divorcé mais dont il avait eu deux enfants. Aussi, en l'absence d'aléa dans la disposition prise trois jours avant le décès du souscripteur, dans la mesure où la prime de 50 003 euros avait pratiquement vidé le compte d'épargne du défunt, il a été justement retenu que ce contrat correspondait de fait à une donation de la prime versée, réductible pour son montant versé.

 

« qu'en effet le versement de cette prime vidait pratiquement le compte Caisse d'épargne de M. Robert X... ;

 

Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu déduire, en l'absence d'aléa dans la disposition prise trois jours avant le décès du souscripteur, que ce contrat correspondait de fait à une donation de la prime versée ; »

 

Il est évident que pour la deuxième chambre civile le critère absolument décisif a été la souscription du contrat trois jours avant son décès par une personne dont le pronostic vital était engagé et qui le savait : il n’y avait donc, lors de la souscription du contrat, aucun aléa quant à la personne qui percevrait le capital du contrat et il s’agissait pour le souscripteur uniquement de transmettre une somme d’argent au bénéficiaire sans rechercher un placement.

 

►« Dès lors que le souscripteur, quel que soit son âge, ne se sait pas atteint d'un mal incurable, il peut placer en assurance-vie la partie de sa fortune encore liquide et désigner qui il veut comme bénéficiaire à condition toutefois de garder pour lui quelques liquidités. » (Suzanne Hovasse, JCP , N, n° 28, 16 Juillet 2010, 1244)

 

2ème exception : primes manifestement exagérées

 

L’article L 132-13 alinéa 2 du Code des assurance prévoit une seconde exception à la dispense du rapport et de la réduction lorsque les « sommes versées par le contractant à titre de primes ( ont ) été manifestement exagérées eu égard à ses facultés.”


Les primes manifestement excéssives sont alors soumises au rapport à succession et à la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers.

 

La Cour de cassation précise que l'excès manifeste des primes “s'apprécie au moment du versement, au regard de l'âge ainsi que des situations patrimoniale et familiale” du souscripteur (Cass. ch. mixte, 23 nov. 2004, n° 01-13592 et n° 02-17507, préc. – Cass. 1re civ., 17 févr. 2005, n° 01-10.471FD : Juris-Data n 2005-027006. – Cass. 1re civ., 24 févr. 2005 : n° 04-12.617 : Juris-Data n 2005-027148. – Cass. 2e civ., 8 mars 2006, n° 04-19177, inédit. – CA Paris, ch. 2, sect. B., 19 janv. 2006 : Juris-Data n 2006-303821.

 

Dans l’appréciation du caractère «  manifestement exagérées » des primes versées, « la jurisprudence fait preuve d’une extrème mansuétude. »

 

Ainsi il a pu être décidé, en toute légalité a dit la Cour de cassation, que des primes absorbant au total près de la moitié du patrimoine de l'assurée lors de la souscription (à un âge très avancé) des contrats n'avaient pas à être prises en compte : 

 

Cass. ch. mixte, 23 nov. 2004,n°02-17.507., 3e esp.

 

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (CA Douai, 25 mars 2002), que les consorts Marie-Christine, Pascal et Claudine X..., ont fait assigner Mme Edith X..., leur soeur, ainsi que Mlle Y..., leur nièce, pour voir ordonner à cette dernière la restitution, à la succession de sa grand-mère Mme Z... veuve X..., du bénéfice de trois contrats d'assurance-vie souscrits par cette dernière à son profit auprès de la société Natio-Vie, au motif que les libéralités consenties dépassaient la quotité disponible ;

 

(...) Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir ordonné l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la succession décidant que Mlle Y... était bénéficiaire des contrats d'assurance sur la vie, alors, selon le moyen :

 

  • 1) que la cour d'appel qui a pris en considération les avoirs boursiers tels qu'ils existaient antérieurement à la conclusion du contrat Duo Dix souscrit le 9 octobre 1992 et la souscription du contrat Multiplacement du 31 octobre 1993 n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 132-13 du Code des assurances ;

  • 2) que la cour d'appel, qui n'a pas apprécié la situation à la date à laquelle a été conclu chacun des contrats, n'a, par là-même, pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 132-13 du Code des assurances ;

  • 3) qu'en relevant que les contrats ont été souscrits en 1987,1992 et 1993 à une époque où la défunte avait 73 ans pour le premier, 78 et 79 pour les suivants étant décédée à l'âge de 82 ans et que dès lors les primes payées étaient manifestement exagérées par rapport à ses facultés, la cour d'appel, qui n'explique pas en quoi la souscription de tels contrats peu d'années avant le décès étaient utiles pour la défunte n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 132-13 du Code des assurances ;

    Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 132-13 du Code des assurances que les règles du rapport à succession et celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers ne s'appliquent pas aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés ; qu'un tel caractère s'apprécie au moment du versement, au regard de l'âge ainsi que des situations patrimoniale et familiale du souscripteur ;

    Et attendu que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que Mme Z... veuve X..., âgée de 73, 78 et 79 ans au moment des versements est décédée à 82 ans laissant plusieurs héritiers, qu'elle disposait de valeurs mobilières d'un montant de 1 200 000 francs en 1992, possédait un mobilier estimé à 336 000 francs en 1990, des biens immobiliers évalués à 500 000 francs lors de l'ouverture de sa succession et percevait une retraite mensuelle de 11 000 francs ; que la cour d'appel en a exactement déduit que les primes versées d'un montant global de 900 000 francs n'étaient pas manifestement exagérées eu égard aux facultés du souscripteur ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision. »

 

La Cour de cassation a jugé qu'une cour d'appel a souverainement retenu qu'au regard de l'âge ainsi que de la situation patrimoniale et familiale du souscripteur, la prime versée au bénéfice de la fille qu'il avait eue d'un premier lit ne présentait pas, au moment de son versement, un caractère manifestement exagéré alors qu'elle représentait 73 % du capital disponible qu'il venait à l'époque de recueillir dans la liquidation consécutive à son divorce. (Cass. 2e civ., 4 juill. 2007, n° 06-14.048)

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